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Passion Provence

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  • Bienvenue chez moi à Trans en Provence dans le Var. Je vous invite à la découverte de la Provence et du Var en particulier à travers son histoire, son patrimoine, ses traditions, ses coutumes, ses légendes, etc...
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18 septembre 2012

Bèn vengudo dins lou Var

 

Région Provence

 

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Trans en Provence au fil de la Nartuby : http://www.transenprovence.info

 

Nouveau blog : Trans en Provence d'hier et d'aujourd'hui : Trans en Provence d'hier et d'aujourd'hui (villagedetrans83.fr)

 

Nouveau blog : Cimetières de Trans en Provence et généalogies transianes

Cimetières de Trans en Provence et généalogies transianes (cimetierestrans.org)

 

La Gazette de Nadine : La Gazette de Nadine (canalblog.com)

 

Ma base de données de généalogie :

 

Des racines et des hommes - Geneanet

 

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"J'aime ce pays et j'aime y vivre parce que j'y ai mes racines, ces profondes et délicates racines qui attachent un homme à la terre où sont nés et morts ses aïeux, qui l'attachent à ce qu'on pense et à ce qu'on mange, aux usages comme aux nourritures, aux locutions locales, aux intonations des paysans, aux odeurs du sol, des villages et de l'air même." (Guy de Maupassant-Le horla)

 

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21 avril 2024

L'hygiène au fil du temps

 

 

Tête d'Higie, attribuée à Scopas et provenant de Tégée - Musée national archéologique d'Athènes

 

Le mot hygiène dérive du nom de la déesse grecque Hygie ou Hygée (du grec ancien hugieinós "bon pour la santé"), qui était la déesse de la santé et de la propreté. Fille d'Asclépios, dieu de la médecine, et d'Epione, celle-ci symbolise la prévention alors que sa sœur Panacée (voir les explications à la fin du texte) est la déesse guérisseuse liée au traitement médical et aux médicaments. Cette origine mythologique explique que les Grecs entretiennent initialement avec leur corps des rapports vertueux, l'hygiène considérée à cette époque comme purificatrice étant ritualisée lors de cérémonies ou de libations. Dans la Grèce antique mais également dans la Rome antique, l'hygiène est un symbole de santé et se concrétise par la fréquentation des bains publics. Hippocrate, considéré comme le père de la médecine fut le premier à préconiser l'hygiène du corps à des fins curatives mais aussi préventives. Il écrivit trois livres sur le sujet consacrés à la diététique, la propreté et l'hygiène. Dans ces écrits, il recommande les exercices corporels, la pratique de bains thérapeutiques et avant toute chose la modération dans l'alimentation et la boisson.

 

Receuil_de_Sante_Rhenanie

 

Le Tacuinum Sanitatis (Manuel de diététique et traité d'hygiène)

 

Au Moyen-Age en Europe, le manuel de diététique et traité d'hygiène de référence est le Tacuinum Sanitatis duquel les médecins extraient des conseils généraux d'hygiène, adaptés aux configurations astronomiques, aux conditions climatiques et à l'âge des patients. L'hygiène domestique médiévale concerne aussi les repas : un véritable guide du savoir-vivre apparaît au XVème siècle, Les Contenances de la table qui recommandent notamment de se laver les mains avant le repas ou de s'essuyer la bouche avant de boire. La nourriture est un chapitre essentiel de l'art médical et de nombreux traités médiévaux d'art culinaire ne sont que des adaptations du Régime du corps du médecin italien Aldebrandin de Sienne. Les étuves et bains publics populaires (hommes et femmes s'y baignant dans des baquets communs) ou raffinés sont en plein essor au XIIIème siècle, Mais l'église catholique d'Europe centrale et occidentale interdit leur pratique et cherche à fermer les établissements la permettant. Elle désapprouve également les bains à la rivière et recommande avant tout les ablutions, la seule eau pure étant l'eau de baptême destinée au salut de l'âme.

 

Réalité-des-bains-publics-étuves-du-moyen-age

 

Bains publics au Moyen-Age

 

Une des raisons invoquées pour bannir les étuves, bains publics et bains de rivière est qu'ils sont suspectés de propager la peste (traumatisme de la peste noire du milieu du XIVème siècle, les médecins craignant qu'elle ne fût transmise par l'eau s'infiltrant dans les pores de la peau et transportant toutes sortes de germes) et que les premiers sont assimilés à des lieux de débauche, parfois de façon justifiée, même si cette débauche n'empêche pas l'hygiène corporelle : leur fermeture se fera progressivement au cours des XVIème et XVIIème siècles. Ces prescriptions religieuses expliquent qu'aux XIVème et XVème siècles apparaissent dans les maisons aisées, au plus près du lit, les "estuves" ou bains privés, la "cuve baigneresse" (cuvier en bois cerclé, dont les parois sont doublées avec une toile pour éviter les échardes) ou la fontaine murale et, plus rarement dans les maisons plus modestes (car le bain chaud reste un luxe), les baquets et bassines qui sont plus réservés au lavage du linge. Le bain privé reste cependant essentiellement un privilège de riche et un signe d'hospitalité.

 

Bains et étuves

 

Les étuves – Le livre de Valère Maxime, XVème siècle - Paris

 

Au début du XVIIème siècle, les bains fréquents qui étaient à la norme dans les cités médiévales disparurent progressivement avec l’arrivée de certaines croyances. La principale était la crainte de la maladie, car on croyait à cette époque que l’eau pénétrait par les pores de la peau et déposait, entre autre, le germe de la syphilis. L’eau était aussi censée faire perdre la vigueur sexuelle et on pensait être épargné de la maladie grâce à la crasse ! L’église, quand à elle, contribua à effacer les bienfaits des bains, en dénonçant l’immoralité de ces lieux qui mélangeaient les individus des deux sexes, et les attitudes lascives que prenaient les femmes lors de bains chauds. On ne peux pourtant pas omettre de dire que durant le XVIème siècle, le nudisme était de rigueur, et qu’il était fréquent de voir quelques attroupements près d’un fleuve ou d’une rivière. Le nudisme des femmes quand à lui, fut interdit au début du XVIIème siècle et le port de la chemise fut rendu obligatoire... On utilisait des parfums  (jasmin, cannelle, jonquille, musc) pour camoufler les mauvaises odeurs et ceux-ci étaient censés servir de désinfectant. Les pastilles d’anis servaient à parfumer l’haleine. Le développement des cosmétiques (notamment l'usage des fards rouges et blancs introduit par Catherine de Médicis ou le poudrage du corps et des cheveux par la pommade de Florence, la poudre de Chypre) souligne qu'à la cour, la vue s’impose face à l’odorat et au toucher. La toilette sèche se fait sur le corps par friction avec un linge propre ou un frottoir en peau, seul le visage et les mains se lavent à l'eau et au savon (ou l'herbe à fossé pour les moins nantis). Le corps est protégé sous la crasse, ainsi un habit blanc devenu noir est bien perçu. Seules les personnes aisées, qui peuvent changer souvent de vêtements, pratiquent une hygiène vestimentaire. La toilette des plus nobles est complétée par l'application de baumes et d'onguents aux vertus préventives, apportés notamment par les Grandes découvertes. Luigi Cornaro (1484-1566), noble vénitien qui vécu centenaire, écrit en 1558 De la sobriété dépend la longévité. Conseils pour vivre longtemps qui "sert de modèle aux ouvrages d'hygiène classiques où la santé est quasi idéalisée, permettant d'épurer le corps, de l'alléger, l'éloignant de toute maladie".

 

Habit-de-parfumeur

 

Habit de parfumeur - Nicolas de Larmessin (1632-1694)

 

A partir du XVIIème siècle, la "toilette sèche" perdure, mais l'usage de l'eau réapparaît petit à petit. Les premiers cabinets de bain se développent chez les gens riches et raffinés dont la blancheur de linge est soulignée au col et au poignet. Le bain froid est jugé hygiénique, non par son pouvoir nettoyant mais par son pouvoir tonifiant, tandis que le bain chaud ne reste qu'une pratique médicale. La bourgeoisie dénonce le caractère masquant des parfums et des cosmétiques de la noblesse, et de fait, l'usage de fards qui blanchissent la peau devient beaucoup moins présent. A partir du XVIIIème siècle, on voit apparaître la terreur des miasmes et les philosophes et les médecins se penchent sur les questions de l'hygiène individuelle et l'hygiène collective. Mais, l'hygiène concerne aussi la "propreté du dessous" puis, la propreté de la peau qui se fait entièrement par le lavage. La réapparition des établissements de bain et la multiplication d'espaces spécialisés (cabinets de bain, bidets, latrines collectives en usage non seulement dans les châteaux ou abbayes mais aussi dans les maisons modestes) est liée au développement de la notion d'intimité. C'est à partir de cette époque que les grandes ville se dotent d'égouts souterrains.

 

Louis Pasteur

 

Louis Pasteur (1822-1895)

 

Au XIXème siècle, Louis Pasteur (1822-1895) développe une théorie des germes selon laquelle certaines maladies sont causées par des micro-organismes. Un nouveau courant de pensée, l'hygiénisme s'appuie sur les travaux de Pasteur et s'intéresse à tous les aspects de la vie quotidienne (propreté des villes, pollution, réseaux d'eau). Les scientifiques et les médecins formulent des recommandations comme le lavage des mains et la toilette quotidienne à l'eau et au savon  qui est produit en masse avec l'essor des industries chimiques de fabrication de soude. Ces instructions sanitaires s'invitent alors autant dans les classes d'école que dans la cour de récréation et dans les familles. Le thermalisme, réputé pour la santé se développe, répondant à la vocation d'une ville de santé conforme aux préceptes de l'hygiénisme urbain. La fin du siècle marque le développement des salles de bain et des toilettes dans les logements en lien avec le développement de l'eau courante dans les maisons.

 

 

Ignace Philippe Semmelweis (1818-1865)

 

C'est Ignace Philippe Semmelweis (1818-1865), chirurgien et obstétricien hongrois qui met en évidence le risque nosocomial. Il devine en 1846 les vrais mécanismes de la contagion de fièvres puerpérales. Les femmes meurent moins en accouchant à leur domicile, à la maternité des sages-femmes de Vienne ou même dans la rue qu’à l’hôpital. Un comble ! Il arrive à la conclusion que les fièvres puerpérales sont véhiculées par les médecins eux-mêmes lorsqu’ils passent des salles de dissection et d’autopsie aux salles d’accouchement sans se laver les mains ni changer de blouses. Il mourut fou, à quarante-sept ans, de ne pas avoir réussi à convaincre les scientifiques de son époque.

 

Source : D'après un article paru dans le site Wikipédia, l'encyclopédie libre.

 

Complément sur Panacée

 

 

Qui était Panacée ? Dans la mythologie grecque, Panacée est la déesse de la guérison. Elle est la fille d'Asclépios, dieu de la médecine et d'Epione, et la petite-fille d'Apollon (dieu du soleil, des arts et de la médecine). Elle est reconnue comme l'incarnation divine du rétablissement et du soin. Elle symbolise un idéal de bien-être absolu. Son rôle ne se limite pas à la guérison physique. Elle représente aussi les propriétés curatives des plantes médicinales traditionnelles. Sa présente évoque un lien étroit entre nature et santé humaine. Dans divers courants ésotériques, elle est perçue comme une divinité généreuse qui offre des solutions pour toutes sortes d'afflictions corporelles et spirituelles. Elle incarne l'espoir en une guérison universelle grâce à ses dons multiples. Elle est experte en concoction de potions magiques qui sont capables d'éradiquer maladies et douleurs physiques. Elle est aussi experte en herboristerie qui aide à calmer l'esprit, réduire le stresse mental et promouvoir la sérénité.

 

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En pharmacie, il était une croyance selon laquelle un remède efficace pouvait exister contre un grand nombre de maladies. On appelait ce remède la thériaque ou la panacée. Ce mot entra dans le langage courant au Moyen-Age. Aujourd'hui, on l'utilise de façon souvent ironique pour désigner un objet, une idée, un concept qui semble être le remède à tous les maux ou tout un ensemble de maux. Le mot est parfois redoublé, on ne parle plus simplement de "panacée", mais de "panacée universelle", ce qui est un pléonasme. Le ginseng appartient au genre panax, traduction latine de Panákeia. La centaurée était autrefois considérée comme une panacée, son nom évoquant le centaure Chiron, qui enseigna la médecine à Asclépios, l'Esculape romain.

 

Source : D'après Wikipédia, l'encyclopédie libre et le site "La porte du bonheur.com".

 

 

14 avril 2024

La légende de la chèvre d'or

 

La chèvre d'or est un animal mythique qui a pour particularité de posséder un pelage, des cornes et des sabots en or. Elle serait la gardienne de trésors légendaires et fabuleux laissés sur place par les Sarrasins du Fraxinet (région de la Garde-Freinet). On trouve mention de sa présence dans différentes parties de la Provence. 

Dans la Provence orientale, la légende la rattache à la fée Estérelle. Alphonse Daudet, dans son conte "Les étoiles", les évoque l’une et l’autre : "Et ta bonne amie, berger, est-ce qu’elle monte te voir quelques fois ? ça doit être bien sûr la chèvre d’or ou cette fée Estérelle qui ne court qu’à la pointe des montagnes".

 

La chèvre d'or - Paul Arène

 

Illustration de La chèvre d'or de Paul Arène (Wikipédia)

 

Paul Arène, dans sa préface à "La Chèvre d’or", fut co-auteur des "Lettres de mon moulin" et des "Contes du lundi", situe lui aussi la "Cabro d’or" en Provence orientale. Mais la légende la situe le plus souvent dans les Alpilles. Dans "Mireio", Frédéric Mistral lui fait hanter la région du Val d’Enfer proche de la vallée des Baux, son repaire préféré où veillant le jour et sortant la nuit, elle garde le trésor d’Abd-el-Rhamân, ce général ommeyyade (Les Ommeyades sont une dynastie arabe qui gouverne le monde musulman de 661 à 750) qui a dirigé des soldats musulmans contre les armées de Charles Martel lors de la Bataille de Poitiers en l'an 732.

 

"Je veux la chèvre d'Or, la chèvre
              Que nul mortel ne paît ni trait
              qui, sous le roc de Baus Manière
              lèche la mousse des rochers
              ou je me perdrais dans les carrières
              ou tu me verrais ramener la chèvre au poil roux !
              hélas ! Combien d'âmes sèches et affamées de gain
              mordant au piège du noir antenois et à la Chèvre d'Or
              font humer leur encens !"

 

Extrait de Mireio de Frédéric Mistral publié en 1859 une œuvre en vers et occitan provençal

 

les-Antiques-le-mausolee-min

 

Les Antiques à Saint-Rémy-de-Provence - Le mausolée

 

On la retrouve aussi à Saint-Rémy-de-Provence où elle campe au sommet du mausolée des Antiques. Là aussi elle est gardienne du trésor d’Abd-el-Rhamân. Il lui arrive de passer le Rhône et d’aller camper sur la rive droite du fleuve. Elle s’installe alors sur un oppidum, le "Camp de César", situé sur la commune de Laudun (Gard). Là, elle veille sur le trésor qu’y laissa Hannibal "roi des Sarrasins d’Afrique". Ce même trésor lui fait aussi hanter le Ventoux. Son antre se situe au-dessus de Malaucène, au lieu-dit "Les Aréniers", près de la source du Groseau. De gigantesques lingots d’or sont cachés derrière la "Porte Saint-Jean" qui ne s’ouvre que la nuit de Noël. Les audacieux peuvent s’en saisir au cours de la messe de minuit puisque la porte s’ouvre entre le début de l’Épître et la fin de l’Évangile.

 

Source : D'après un article de Wikipédia - l'encyclopédie libre

 

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Sur le versant méridional du plateau des Encourdoules qui domine Valauris (Alpes-Martimes), une faille de roc donne péniblement accès à la grotte de la Chèvre d'Or, "lou traou de la cabro", ou seraient entassées en des profondeurs mystérieuses des masses d'or et de pierres précieuses. On ne pourrait arriver jusqu'à ces trésors sans l'aide d'une chèvre aux cornes d'or, postée sur le seuil et invisible durant le jour. Elle apparaît le soir, éveillant, par ses bonds capricieux, la curiosité du passant. Malheur à celui qui la suivrait dans la grotte, il ne reverrait jamais la douce lueur du jour. égaré dans le labyrinthe des couloirs ténébreux, il perdrait bientôt le trace de la chèvre aux cornes d'or et mourrait misérablement de faim, de soif et d'épouvante, près des plus mirifiques richesses. C'est ce qui est arrivé, conte-t-on, à tous ceux qui ont voulu suivre la chèvre dans sa sombre retraite.

 

Source : Le Folklore de la Provence - Claude Seignole - 1963

 

Chèvre d'or

 

Je vous mets un lien vers ce site : "J'aime le Vaucluse", dans lequel j'ai trouvé un article sur la chèvre d'or qui complète mon article.

 

La chévre d'or

La légende de la Chèvre d'or est présente dans bien d'autres lieux aussi bien en Provence, comme l'a constaté Paul Arène, que dans des contrées plus éloignées. La chèvre d'or est un animal fabuleux qui possède un pelage, des cornes et sabots d'or.

https://www.j-aime-le-vaucluse.com
7 avril 2024

A Toulon, au temps des fumeries d'opium

Opium fumerie 4

 

Vers 1900, à l'époque de l'empire colonial et alors que l'Orient fait rêver, à Toulon comme dans les autres villes portuaires, on trouve jusqu'à 200 fumeries d'opium clandestines. En Angleterre, on "mange" l'opium comme en Inde, en France, on fume le "chandoo" comme au Tonkin. Les marins et les militaires de retour d'Indochine, les Asiatiques immigrés, les négociants et les fonctionnaires français ont rapporté cette habitude de "tirer sur le bambou" des territoires indochinois qu'ils ont fréquentés. Les ports de Toulon et de Marseille seront ainsi "contaminés" en premier. La pratique se propageant ensuite aux villes portuaires telles Brest, Rochefort, Cherbourg, avant d'atteindre Paris. A Toulon, les marins fréquentent les maisons closes, mais se sont surtout les courtisanes appelées demi-mondaines, qui contribuent grandement à développer la pratique de l'opium comme une prestation supplémentaire pour leurs clients. Les fumeries sont aménagées le plus souvent chez ces dames, dans leurs villas du Mourrillon ou leurs appartements situés dans la haute ville, où elles ont aménagé une pièce de leur logement de manière exotique : des nattes, des matelas et des coussins sur le sol, un paravent chinois, tout l'attirail du fumeur sur un plateau (pipe, lampe, aiguille), sans oublier les kimonos dont elles se parent pour recevoir leurs hôtes. Elles se nomment Libellule, Hélène Narcisse, Rose Pétrole, Joujou, Clo-Clo, Claire d'Orthys, Gaby de Pulvis, Marcelle Esther ou bien Jeanne de Rochefort. C'est dans les bras de ces demi-mondaines, actrices ou encore danseuses de cabaret, que les officiers et sous-officiers de Marine, noient leur ennui et passent leur temps. Toulon ne vit alors que pour sa Marine et sa garnison. Les fumeries seront répertoriées par les services de police jusqu'au décret de 1908 où l'importation d'opium sera réglementée et la vente absolument interdite. Vers 1910, en France la "noire idole" est partout, dans tous les milieux : les arts, la littérature, la peinture, le cinéma... A l'Assemblée nationale, on réprouve cette pratique mais l'intérêt supérieur des colonies prime. L'opium est mollement réprimé. Un rapport de police daté du 20 janvier 1913 établi que : "l'usage et le trafic de l'opium ont repris depuis quelques mois une extension considérable à Toulon. L'arrivée de l'escadre du Nord est venue augmenter le nombre des fervents passionnés de ce dangereux poison.

 

Opium fumerie 1

 

Opium

 

Beaucoup de nouvelles demi-mondaines ont créé dans leurs appartements des fumeries et invitent ainsi leurs amis à venir fumer. Quelques femmes d'officiers de marine ont ajouté ce complément de fumerie à leurs réceptions". Ce rapport de police indique également que l'opium est apporté de Marseille et de La Ciotat où il est acheté à bord des bateaux venant de Chine et du Japon. Des douaniers du port de la Joliette à Marseille faciliteraient la vente de l'opium en dépôt dans les docks et les entrepôts par des manœuvres illicites et moyennant rétribution. Le 23 avril 1913, un journaliste du journal Le Matin révèle qu'il y aurait à Toulon 163 fumeries clandestines et qu'il aurait vu des officiers de marine fumer jusqu'à 80 ou 100 pipes en une seule soirée ! L'amiral Bellue, préfet maritime de Toulon reconnaît alors que la "toufiane" envahit notre flotte. Le péril est grand car il menace à la fois la santé et la sécurité nationale. Tous les jeunes officiers fument. La Marine et les militaires sont pointés du doigt. Parallèlement, on reproche aux artistes qui ont traité de l'opium dans leurs œuvres d'en avoir véhiculé une image romantique et encouragé ainsi sa pratique. Parmi eux, Charles Dickens, Walter Scott, Edgar Allan Poe, Charles Baudelaire, Jean Cocteau, Pierre Loti, Claude Farrère. Pourtant, dès 1906, le ministère de la Marine est intervenu auprès du préfet de Toulon afin qu'il procède à des perquisitions dans les fumeries et qu'il les ferme. Seulement voilà : nulle loi ne condamne l'opium. Finalement, à force de perquisitions et de fermetures publiques, les fumeries disparaîtront après 1916, laissant une armée et une marine affaiblies par ces pratiques opiomanes.

 

Source : D'après un article d'Ambre Mingaz paru dans le supplément du journal Varmatin du 25 mars 2012.

 

Opium fumerie 2

Opium fumerie 3

 

Opium, poison de rêve
Fumée qui monte au ciel,
C'est toi qui nous élève
Au paradis artificiel.
Je vois le doux visage
Les yeux de mon aimée,
Parfois j'ai son image
Dans un nuage de fumée.

Dans le port de Saïgon
il est une jonque chinoise
Mystérieuse et sournoise
Dont nul ne connaît le nom.
Et le soir dans l'entrepont,
Quand la nuit se fait complice
Les Européens se glissent
Cherchant des coussins profonds.

Et le soir au port falot
Les lanternes qui se voilent
Semblent de petites étoiles
Qui scintillent tour à tour.
Et parfois dans leur extase
Au gré de la fumée grise,
Le fumeur se représente
Ses plus beaux rêves d'amour.

Puisqu'on dit que le bonheur
N'existe pas sur la terre,
Puisse l'aile de nos chimères
Un jour nous porter ailleurs
Au paradis enchanteur
Plein de merveilleux mensonges
Où dans l'ivresse de mes songes
J'ai laissé prendre mon coeur.

 

Paroles de la chanson Opium créée en 1930 par Charlys et Guy d'Abzac

 

Opium matériel

31 mars 2024

La campagne, des bois aux champs (2ème partie)

 

 

Les châtaignes, le pain des vieilles montagnes des Maures et de l'Estérel, n'intéressent plus grand monde. Les arbres sont malades, abandonnés. L'histoire des célèbres marrons du Luc semble bien près de s'achever, comme celles des amandons pour confiserie, culture des hauts-pays. Dans ces conditions, le travail des champs continue comme jadis, long, pénible. Machines à vapeur et mécaniques perfectionnées, faucheuses et moissonneuses, sont réservés aux grandes propriétés de la région d'Hyères, de Rians, de Salernes, de Comps... Les sols des plaines les plus épais sont travaillés à la charrue simple. Mais, pour nombre de petits propriétaires, celles-ci sont encore trop chères, trop lourdes à tirer et les chevaux font souvent défaut. Dans la région du Golfe, certains attèlent encore des bœufs. Aussi l'araire se rencontre-t-il partout. Transporté à dos d'âne, tiré par ce même animal, il gratte le sol maigre des restanques sous les oliviers. Un an sur deux ou trois, la jachère règne, faute d'engrais. Viennent la moisson et ses rudes journées. La faux et, par endroits, la faucille couchent les épis. Des gavots sont venus à la fin juin. En ligne, les hommes coupent, les femmes lient. De l'aube à la nuit, il faut garder le rythme.

 

 

Les pauses sont brèves, pour se reposer et se restaurer. Une assiette de soupe le matin, avant de partir aux champs ; à 8 heures, pain, oignons et anchois ; à midi, repas froid, légumes, figues sèches, olives et force pain ; à 16 heures, on fait "merenda", un petit goûter ; après une belle tirée, la journée s'achève enfin par une assiette de soupe et un plat, maigre le plus souvent : des légumes cuits à volonté. Salade sauvage, broussin grillé, farigoulette même, n'étaient pas négligés. Par contre, œufs et volailles, et plus encore la viande de boucherie, réservés aux jours de fête, n'apparaissaient que pour le repas de fin de moisson. Les champs sont souvent petits, les rendements faibles, 7-10 quintaux à l'hectare. La moisson dure peu. La dernière gerbe, parfois fleurie, a quitté les restoubles (emblavures : terres ensemencées en blé).

 

 

Le dépiquage peut commencer. "On dépique les blés par les procédés bibliques et barbares des chevaux mulets foulant les gerbes" note le journaliste Victor-Eugène Ardouin-Dumazet (1852-1940) auteur de Voyage en France. Les rouleaux en pierre se sont répandus depuis leur apparition vers 1850 dans la propriété, promue ferme-école, de Charles de Gasquet, à Salgues, près d'Entrecasteaux. Puis, à la pelle, avec le van et mieux encore le tarare, le grain est purifié. Ensaché, il sera échangé contre de la farine, du pain chez le boulanger, moulu chez le meunier, vendu à quelque foire... Rien n'a changé depuis des siècles autour de l'olivier. On le taille "aux premiers boutons", sévèrement car, comme le dit le vieil adage, "faï mi paure, te faraï riche" (fais-moi pauvre, je te ferai riche). De décembre à mars, l'acanaire (le gauleur), la canne en main, gaule les fruits mûrs, d'un coup sec, dans le sens des rameaux.

 

 

 

En bas, sur les draps étendus, femmes et enfants ramassent les olives, cassés en deux, les doigts gourds et douloureux par les fraîches journées hivernales. Rares sont les olivettes basses où les femmes grimpées sur leur cavalet à trois pieds, peuvent cueillir les fruits. Une partie de la récolte est vendue sur les gros marchés voisins de Draguignan et de Grasse. Pour le reste, les moulins tournent jusqu'au printemps. La meule, dressée dans l'auge (la mare), écrase les olives nettoyées des feuilles et ramilles du gaulage. La pâte, tassée dans les scourtins, est pressée, parfois encore dans les antiques pressoirs à chapelle. Ici et là, la fête célèbre l'or fruité de l'huile nouvelle, goûtée et savourée sur des tranches de bon pain, entre hommes, près des meules. Mais l'olivier n'enrichit plus personne malgré les tentatives de regroupement et de modernisation dans le cadre des toutes jeunes coopératives, comme La Travailleuse, dite "la rouge", premier moulin coopératif moderne né à Cotignac le 6 août 1905.

 

 

Déjà beaucoup d'arbres ne sont plus taillés ni fumés. Abandonnés aux maladies, fumagine et neiroun, ils rejoignent dans la disgrâce les châtaigniers, les blés et les moutons. Heureusement, quelques réussites avaient pris le relai. Le rétablissement de l'élevage du ver à soie est sans doute, incomplet et discret. Naguère, de très nombreuses communes "faisaient les magnans". Depuis, la concurrence, la maladie, la terrible pébrine, la chute des prix ont découragé les éleveurs : 6 à 8 francs le kg de cocons vers 1866-1870, 3 francs seulement vingt ans plus tard. A la fin du siècle cependant, se produit un sursaut, grâce à l'aide de l'Etat et surtout au choix d'une spécialisation heureuse : la production de graines de ver à soie. Des Mayons et du Muy au Luc, de Draguignan au golfe de Saint-Tropez, les magnaneries revivent. Au dernier étage, une grande pièce bien aérée, est désinfectée à la chaux et pourvue d'un poêle. Des claies de canisses attendent leurs hôtes. En avril, les graines arrivent dans leurs petites boites banderolées de leur garantie. Dans la chaleur de la cheminée ou littéralement couvée dans le giron de la maîtresse de maison, elles éclosent une dizaine de jours après.

 

 

Aussitôt, les jeunes chenilles, affligées d'une incommensurable fringale, se mettent à denteler et à engloutir les feuilles de mûrier dans un bruit d'averse perpétuelle. Tous les jours, ces estomacs sans fond réclament leur dû. Et il faut encore nettoyer les claies, toujours sales, surtout après les mues. Heureusement, la vie de ces goinfres malpropres est brève. Après la quatrième mue, dès la croissance finie, les branches de genêt, de bruyère sont fichées sur les claies. Bientôt les vers, bouffis, grimpent, cherchent leur place, se fixent et s'encoconnent vers la mi-mai. Trois ou quatre jours encore et c'est fini. Il reste aux femmes à recueillir habilement les cocons puis à les porter à la "fabrique". Pour quelques 6 000 éleveurs, la vie redevient plus calme en même temps que rentrent les premiers gains de l'année.

 

Les graines, les cocons, les papillons et les vers à soie (Photo internet)

 

Source : D'après le livre "Le Var autrefois" - Yves Rinaudo - Editions Horvath

 

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24 mars 2024

La campagne, des bois aux champs (1ère partie)

 

 

Le XIXème siècle a son terme à été rude. Les crises, la maladie du ver à soie, celle de la vigne, la concurrence, en ont découragé plus d'un. Et les hommes vieillissent. Les jeunes s'en vont tandis que se vident les berceaux. Les champs abandonnés, les friches s'étendent. Maigres taillis et rares futaies, chênes et pins, cistes (messugues) et genêts, bruyères et ronces, garrigues et maquis, landes et terres "gastes" (terrains pauvres, peu fertiles), mangent le paysage 200 000 hectares de terres cultivées et guère plus de forêt en 1873, mais respectivement 150 000 ha et 300 000 ha un demi-siècle plus tard. Ces nouveaux espaces sauvages, moins parcourus et moins disputés que jadis, restent bien utiles et même indispensables pour beaucoup. Les moins chanceux y prélèvent de précieuses ressources. Herbes et plantes aromatiques, champignons, escargots, parfums et gloires de la cuisine rustique, sont recherchés, parfois vendus sur le marché du village ou de la ville avec le cade, apprécié pour ses vertus thérapeutiques, et quelques fagots pour allumer le feu. Les austères pays du Haut-Var récoltent la lavande, distillée sur place ou vendue aux parfumeurs de Grasse. De l'automne au printemps, les bouscatiers peinent dans les coupes. Ils sont venus nombreux d'Italie et sont renforcés l'hiver par des paysans du haut pays alors peu occupés par les travaux des champs.

 

 

Les charbonniers, eux, construisent leur "motte" fragile avec soin et précision. La qualité de la cuisson doit tout à leur art. De Rians à Comps, Fayence et Montauroux, on va, au printemps, piquer la "rusque" (écorce de chêne-liège) en famille, par villages entiers. Les baliveaux de chênes-lièges coupés, leur écorce incisée tout du long, délicatement martelée, se détache. Séchée puis broyée dans le moulin à tan, elle livre son précieux extrait, longtemps indispensable à la préparation des cuirs.

 

 

Moulin à tan (Photo Nadine-Musée des ATP à Draguignan)

 

Depuis la fin du XIXème siècle cependant, des produits "chimiques" sont en passe de ruiner le tan varois. L'été, les suberaies (forêts de chênes-lièges) des Maures et de l'Estérel s'animent. Les rusquiers s'affairent au démasclage (liège mâle) et au levage (liège femelle) de l'écorce du chêne, naguère grande richesse du pays. Une incision circulaire à la naissance des branches, une autre à la base du tronc, deux fentes en long, un léger martelage de chaque côté, et, sous la poussée du fer glissé entre la "mère" et l'écorce, le liège vient.

 

 

L'arbre est déshabillé par plaques, sur une dizaine d'années. Coupé en "planches", raclé à l'herminette, le liège est transporté jusqu'à l'usine voisine, tâche malaisée dans ce pays coupé de profonds ravins. Et comme il faut encore compter avec la rude concurrence de l'Afrique du Nord, de l'Espagne, de l'Italie, bien des abandons se sont produits. Ici et là, des chercheurs de trésors étranges sont à l'œuvre. Ceux-là, à Vérignon, à Aups, à Ampus, dans le canton de Comps, à Mons encore, se cachent et taisent le secret de gîtes mystérieux où, au pied des chênes, dort la truffe incomparable. Guidés par le flair du cochon ou le vol de la mouche dorée, ils partent à la chasse au trésor dans la froidure hivernale du haut pays. Mirage prestigieux qui pousse "au cul du cochon" des gens "sérieux", des notables, et jusque dans la région d'Hyères. Ceux-ci moins passionnés, fouillent le sol pour extraire des racines : racines de bruyères pour les fabriques de pipes de Cogolin, racines de buis dans la région d'Aiguines pour les tourneurs du village.

 

 

Mais les rois de ces contrées, ce sont les chasseurs et la braconniers. Dès l'ouverture de la chasse, les bois pétaradent sans arrêt ou presque : grives (tourdres) et perdrix (bartavelles), cailles et bécasses, oiseaux divers, gibier d'eau des marécages côtiers de l'Argens et du Gapeau, lièvres et sangliers connaissent des temps difficiles. Car ici tous les hommes dignes de ce nom sont chasseurs. Les plus habiles d'entre eux accèdent à la gloire, du moins locale. Au sommet, le chasseur de sangliers dépasse les autres par la noblesse de son art, aux règles précises qui distribuent les rôles et partagent les honneurs. La bête repérée, les tireurs sont postés. Chiens et rabatteurs lancent la chasse. Le sanglier abattu, après avoir posé pour la postérité si le photographe est là, se déroule le partage ritualisé et codifié : la tête va au tueur, le reste est découpé en lots tirés au sort. Tout se termine  par une de ces ribotes réservées aux hommes, qui rompt avec le quotidien et consacre un temps de marginalité sociale où l'on mange, où l'on parle, où l'on se tient autrement. Les nouveaux apprennent et les anciens se remémorent des histoires de chasse, grosses de secrets pour les initiés et de gloriole pour les profanes. Tout un imaginaire de la chasse se raconte et s'enrichit, bien inscrit au cœur de la culture, du temps et de l'espace villageois. Car chasser c'est apprendre et retrouver, connaître et vivre, les terres et les bois, les bêtes et les gens. Le temps de la chasse, c'est encore celui du corps et du terroir. Aussi, le plus doué est-il l'honneur du pays, qui reconnaît en lui sa plus belle image.

 

 

C'est Maurin des Maures, le "légendaire" chasseur-braconnier, libre parce que marginal, vainqueur modèle parce que maître de son espace, héros rêvé devenu mythe vénéré (héros du roman de Jean Aicard inspiré d'Aristide Fabre). Mais pour les simples mortels, cette masse de petits paysans propriétaires, il faut bien travailler la terre pour gagner sa vie. De ce côté-là, la géographie et l'histoire ont décidé. L'eau rare, les terroirs morcelés, les sols minces, l'ouverture au marché national ont dicté l'orientation : la vigne et les cultures délicates seules rapportent désormais. Certes, l'antique héritage agricole n'a pas disparu. Sur les terres sèches des plateaux et des plaines, au flanc des coteaux, on sème toujours la tuzelle (touselle : blé tendre) chère aux poètes varois, toujours vaillante malgré l'assaut des variétés modernes. Les oliviers, le noble cayon, mûrissent leurs fruits. Les moutons hantent les chaumes et les bois.

 

 

Les avérages (bétails menus : ovins ou caprins) conduits par leurs pastres, suivis de leur âcre parfum, montent au printemps vers les alpages, escortés de sonnailles et noyés de poussière. Ils redescendent pour la Saint-Martin et les ancestrales drailles retournent au calme de l'attente. Certaines n'en sortiront plus. Car, depuis la fin du Second Empire, ces antiques richesses ont beaucoup souffert. Le blé produit trop peu et ne rapporte plus rien. Les huiles locales, même les plus réputées, celles de Lorgues ou de Solliès, résistent de plus en plus mal à la concurrence des rivales "exotiques" (arachide), étrangères (Italie, Espagne, coloniales (Tunisie), des produits nouveaux (pétrole) ou trafiqués. Partout des prix de misère... Les troupeaux de moutons se réduisent. Laine et viande viennent d'ailleurs. Dans les bois et sur les landes, au long des routes et des drailles, ils se font plus rares, sauf dans quelques secteurs fidèles comme les pays de Comps qui élèvent aussi des mulets. Seul bénéfice : leur nourriture, naguère source de bien des soucis et de pas mal de conflits, n'en pose plus beaucoup.

 

Source : D'après le livre "Le Var autrefois" - Yves Rinaudo - Editions Horvath

 

Cet article sera suivi d'une deuxième partie.

 

17 mars 2024

Tout ce qu'une femme doit faire pour être heureuse en ménage par Agnès Rouvier d'Aiguines - 1919

 

Voici à présent le dernier volet de la série des publications d'Agnès Rouvier d'Aiguines dans son agenda de 1919. Je précise que cet agenda est tellement riche que je n'ai pas pu tout étudier pour tout vous relater.

 

 

Ce texte s'intitule : "Ce qu'il est bon de savoir ou tout ce qu'une femme doit faire pour être heureuse en ménage".

 

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1 - Ne commence jamais une dispute, mais si une explication devient inévitable, ne cède pas avant d'avoir obtenu raison.

2 - N'oublie jamais pourtant que tu es la femme d'un homme et non pas d'un être supérieur, cela te fera comprendre ses faiblesses.

3 - Ne demande pas trop d'argent à ton mari. Tâche de te tirer d'affaire avec l'argent qu'il te donne au commencement de chaque semaine.

4 - Si tu t'aperçois que ton mari a le coeur un peu large, souviens-toi qu'il a également un estomac. Soigne bien son estomac et tu auras vite fait de gagner son coeur.

5 - De temps à autre, mais pas trop souvent, permets à ton mari d'avoir le dernier mot, cela lui fera plaisir et ne te nuira nullement.

6 - Lis le journal entièrement et non pas les nouvelles sensationnelles seulement, ton mari s'entretiendra volontiers avec toi au sujet des évènements du jour et de la politique.

7 - Garde toi de froisser ton mari, même pendant une période de  bouderie.

8 - De temps en temps, fais lui un compliment en lui disant qu'il est le plus gentil et le plus attentif des hommes mariés, mais fais lui comprendre en même temps qu'il n'est pas sans défaut non plus.

9 - Si ton mari est intelligent et actif, sois pour lui une bonne camarade, s'il est un peu lourd sois pour lui une amie et une conseillère.

Ne voilà-t-il pas de forts sages préceptes et faciles à suivre ?......

 

Agnès Rouvier

 

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J'espère que ce texte vous a plu. Moi je l'ai trouvé génial car il ne faut pas oublier qu'il a été écrit en 1919 !

 

 

10 mars 2024

Mon sol natal "Les Cavaliers" par Agnès Rouvier d'Aiguines - 1919

 

Je vous livre comme promis une suite de l'agenda d'Agnès Rouvier d'Aiguines. Elle fait ici une description de sa ferme familiale où elle est née et où elle a grandi.

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De nos lieux par une claire après-midi, on peut contempler un vaste paysage. D'abord au pied de la colline de Marjès, est épandue une vaste plaine où sont groupés nos champs bordés d'érables, de chênes et de buis. Bientôt le terrain se relève, se mamelonne, s'ondule et c'est là même qu'est située notre campagne "Les Cavaliers", aux murs vieillis, bâtis absolument sur le roc aux toits versants à plusieurs côtés, grisés par les temps. Deux prairies au fin gazon, aux mille petites fleurs odorantes encadrent le vieux ménage, à leur extrémité, un petit bosquet aux chênes gigantesques, aux bois touffus, ombragent et servent de refuge à certaines bêtes sauvages. Le terrain va toujours montant et forme une nouvelle colline rocheuse où ne croît que le buis et quelques menues herbes. Au sommet et à l'extrémité nord de la colline se trouve le roc tombant à pic, se continuant en gorges d'une extrême profondeur, nous formant une barrière tout à fait au nord de notre terroir. Là même, au fond de cet abîme, roule le Verdon, impétueux et sombre, brisant ses vagues à l'impérieux rocher, qui sur les deux rives l'enserre et l'étreint. Par les chaudes soirées de juillet au mois où le soleil a transformé la rivière en un vase fleuri, la solitude de ce lieu est étrange, et remplit l'âme du voyageur d'une mystérieuse épouvante. Qu'y a-t-il de plus pittoresque que cette majestueuse vallée verdoyante, ces bois parfumés, pleurant de rosée, quand les oiseaux les plus variés y chantent leur chanson matinale. L'aigle royal, souvent perché là-haut, au point culminant du rocher, sembler se plaire à contempler notre paysage. Le merle, le pinson, l'hirondelle s'insinuent au nid. Le gai rossignol s'y plaît davantage, bercé par tant de charmes, il nous envoie de délicieuses mélodies. Mais à l'automne, quand souffle la bise, poussant les nuées du nord, notre paysage s'anime et prend une parole. Le chêne frissonne, l'oiseau se tait, la rivière monte, clapote davantage et tous ces murmures s'unissent à la plainte du vent. Alors notre petit coin perdu du vaste monde est vraiment superbe, d'une beauté sauvage et presque ignorée, mais mon pays que j'aime, pays où je suis née, pays où j'ai ri, où j'ai pleuré, pays où j'ai aimé.

Les Cavaliers, le 18 janvier 1919. Agnès R.

 

 

La ferme des Cavaliers. J'ai trouvé ces deux photos sur internet et je pense que c'est la ferme où habitait la famille Rouvier.

 

3 mars 2024

L'agenda d'Agnès Rouvier d'Aiguines - 1919

https://archives.var.fr/arkotheque/consult_fonds/index.php?ref_fonds=24

Les Archives départementales du Var ont reçu récemment un don original d'un agenda PLM (chemins de fer Paris, Lyon, Méditerranée) ayant appartenu à Agnès Rouvier de la ferme des Cavaliers à Aiguines. Née en 1898 à Aiguines et décédée en 1979, cette agricultrice annota dans cet agenda les évènements marquants de l'année 1919. 

On découvre un agenda tel qu’il se faisait après la guerre, comprenant des lieux touristiques à découvrir au gré des voyages en train ainsi que des dessins enfantins annotés aux influences militaires. Mais surtout ce document est le reflet de la vie à la campagne au début du XXème siècle. Agnès y a inscrit le travail dans les champs, l’élevage, la chasse et les activités alimentaires. On y découvre les nombreux déplacements dans les villages des alentours et la météo journalière au fil des saisons. Elle y parle de sa vie, de celle de sa famille. Elle y a également noté des maximes, des citations, des poésies et des textes qu'elle copiait.

Le document coté en 1 J 919 a été numérisé. Il est consultable en ligne dans le fonds "Archives privées" en suivant ce lien : 

https://archives.var.fr/arkotheque/consult_fonds/index.php?ref_fonds=24 

Tapez dans la barre de recherche "Type de document": "agenda".
 
J'ai trouvé ce document très intéressant et j'ai décidé de vous en faire profiter. N'hésitez pas à vous rendre sur le site des Archives pour consulter tout ou partie de cet agenda.
 

J'ai recherché dans les archives en ligne (site des Archives départementales du Var) et je vous livre l'acte de naissance d'Agnès Léa Rouvier née le 27 janvier 1898 à Aiguines et décédée le 8 septembre 1979 à Tourtour.

 

Teneur de l'acte :

 

Mairie d'Aiguines - arrondissement de Draguignan

 

Du vingt huit janvier mil huit cent quatre vingt dix huit à cinq heures du soir

Acte de naissance d'Agnès Léa Rouvier, née à Aiguines le jour d'hier à trois heures du soir, fille de Louis Alexandre Rouvier, né à Aiguines département du Var, profession de cultivateur âgé de vingt-neuf ans, domicilié à Aiguines et de Octavie Marie Gastinel son épouse, née à La Palud, département des Basses-Alpes, profession de cultivatrice, âgée de vingt-un ans, domiciliée à Aiguines. Il a été vérifié que l'enfant à moi présenté est du sexe féminin. Sur la déclaration à moi faite par Louis Alexandre Rouvier, père de l'enfant, âgé de vingt-neuf ans profession de cultivateur, domicilié à Aiguines. Premier témoin, Tournatoris Victor, âgé de quarante-six ans, profession d'instituteur public, domicilié à Aiguines. Second témoin Pascalis Gustave, âgé de quarante-quatre ans, profession de tourneur sur bois, domicilié à Aiguines. Constaté suivant la loi par moi, Cauvin Antoine Joseph, Maire de la commune d'Aiguines remplissant les fonctions d'officier de l'état-civil, et lecture du présent acte a été donnée à la partie déclarante et aux témoins qui ont signé. (Suivent les signatures). En marge de l'acte, est inscrite la mention du mariage d'Agnès Léa Rouvier "mariée à Aiguines le 26 février 1927 avec Bagarry Paul Louis".

De leur mariage est issu un fils : Bagarry Armand Eugène, né le 8 décembre 1927 à Aiguines et décédé le 3 octobre 2011 à Salernes.

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On trouve également une carte postale-photo représentant "Les filles d'Aiguines" comme Agnès l'a mentionné. Je suppose qu'Agnès est la première à gauche surmontée d'une croix. Au dos, on lit : Souvenir du 1er novembre 1917, Aiguines.

 

Contenu de l'agenda

 

Des dessins enfantins annotés aux influences militaires. En voici quelques-uns :

 

La visite au dépôt : les abonnés

- Qu'est-ce que vous avez ? J'ai mal au ventre - Bien, donnez-lui une purge. Et vous ? J'ai mal au pied, je ne peux pas marcher. - Une purge aussi, ça le fera courir.

- J'ai tous les as ! Retenez-le, il va s'envoler.

- Où vas-tu en perm ? - A Paris. - T'es pas fou ?... pour te faire bombarder !

- Capitaine, il y en a un qui n'a pas de pantalon. - ça ne fait rien, ce sera un Ecossais.

- Vous êtes tué ? Oh ! alors vous ne pourrez pas goûter. - Oh si ! parce que je suis tué simplement aux jambes.

 

A présent, quelques-unes des très nombreuses maximes retranscrites par Agnès au fil des pages :

 

- Nos défauts nous rendent ridicules et malheureux. - Jamais un bienfait ne tombe dans l'oubli. - Douces paroles brisent parfois les os. - La lecture est un des plaisirs le plus doux et le plus charmant. - Une femme aimable doit avoir non seulement les grâces extérieures, mais les grâces du coeur et du sentiment. - Il n'y a que la modestie et la docilité qui puissent excuser l'ignorance. - Pour être juste, il faut être humain. - Le sage supporte qu'une âme égale avec courage les coups de l'adversité. - Que de gens se moquent des ridicules d'autrui, sans songer qu'ils ont en eux les mêmes faiblesses et les mêmes défauts ! - On a souvent tort par la façon dont on a raison. - L'avare est l'esclave de son argent ! - L'homme bienfaisant est le vrai sage : on l'aime pendant sa vie et on le pleure après sa mort. - L'avenir d'un enfant est toujours l'ouvrage de sa mère. - Parler c'est semer, écouter c'est recueillir. - A grand vaisseau, grand voyage ! - Une conscience tranquille est une fête perpétuelle. - La place que les hommes occupaient se mesure au vide qu'ils laissent. - L'avarice est la première preuve de la bassesse de l'âme. - Il est difficile de donner ce qu'on n'a pas, l'ennui fait exception à cette règle. - Les malheurs incompris sont les plus terribles. - Le bien qu'on fait parfume l'âme. - Quand on veut plaire à tout le, on ne plait à personne. - L'exemple est le plus éloquent de tous les sermons. - L'enfant vit dans l'avenir, le vieillard dans le passé et le sage dans le présent. - La blessure vit au fond du cœur. - Les paroles s'envolent, les écrits restent.

- Comme il est ennuyeux le jour sans soleil ! Comme il est sans attraits le jardin sans fleurs ! Qu'elle est grande la maison sans enfants ! Et qu'il est triste le foyer sans jeune fille ! Etc....

 

Puis, quelques-unes des annotations quotidiennes d'Agnès :

 

Mardi 4 février 1919 St Gilbert

 

Mon père et Samuel sont allés à Basset chercher la paille. Bertin garde le troupeau. Couture, dentelle. Visite de Joseph L. à la veillée. Beau temps, doux.

Les plaisirs de le pensée sont des remèdes contre les blessures du cœur.

 

Mercredi 5 février 1919 Ste Agathe

 

Visite de Henriette de Boï. Couture, tricot. Temps nuageux, calme. 

 

Jeudi 6 février 1919 Ste Dorothée

 

Mon père, Bertin et ceux de Boï sont allés à la chasse aux sangliers dans la marine. Filature dentelle. Temps mistral doux.

 

Vendredi 7 février 1919 St Romuald

 

Différents travaux de ménage. Temps mistral, nuageux.

 

Dimanche 9 février 1919 St Jean de Matha

 

Différents travaux de ménage. Couture, dentelle. Visite de Joseph Lions de Boï. Temps nuageux, froid, 20 cm de neige.

 

Jeudi 13 février 1919 St Lézin

 

Samuel est allé à La Barre. Couture, tricot. Le soir après souper, Topino a poursuivi un hérisson dans le bosquet, Samuel et Bertin sont allés avec leur fusil croyant que c'était un sanglier. Ils ont apporté un hérisson tout roulé en boule et couvert d'épines. Demain nous le laisserons échapper. Temps nuageux, doux.

 

Vendredi 14 février 1919 St Valentin

 

Lavage, filature. Mon père, Bertin et Fortuné L. de Boï sont allés à la chasse aux sangliers dans la forêt. Visite de Baptistin Burle. Temps beau, doux.

Que notre main gauche ignore ce qu'à donné notre main droite.

 

Lundi 31 mars 1919 Ste Balbine

 

Couture. Travaux différents. Passage d'un avion allant de l'est à l'ouest. Attirée par un grand bruit d'automobile, je l'aperçus survolant la colline de l'Empluillon à 15h15. C'est le facteur de Nice-Avignon. Temps beau.

Les idées les plus raisonnables sont aussi les plus lentes à triompher...

 

Signature d'Agnès Rouvier

 

Je ne veux pas faire plus long, car cela serait fastidieux. Pour moi, à taper et pour vous à lire. Je vais cependant poursuivre par un autre article trouvé dans l'agenda d'Agnès qui a pour titre : Mon sol natal, "Les Cavaliers" qui paraîtra le 10 mars 2024, suivra ensuite un troisième intitulé : "Ce qu'il est bon de savoir ou tout ce qu'une femme doit faire pour être heureuse en ménage" qui sera mis en ligne le 17 mars 2024.

 

27 février 2024

Les ponts de Provence

 

Limitée par le Rhône à l'ouest ; parcourue par la Durance et ses affluents : le Verdon, l'Ubaye, l'Asse, et la Bléone ; drainée par une multitude de rivières : le Var, la Siagne, l'Argens, le Gapeau et l'Issole dans le Var, l'Ouvèze, l'Aigues, la Nesque, Les Sorgues, le Calavon et le Coulon dans le Vaucluse, pour ne citer qu'eux, la Provence est profondément découpée, et pour passer d'une rive à l'autre, les hommes ont dû construire une multitude de ponts. Ils se chiffrent par centaines. Ces cours d'eau ayant des caractéristiques très différentes, la provence offre un large éventail de ponts : ponts de pierres, de bois ou de métal ; ponts à arches et ponts suspendus, ponts à dos d'âne et ponts plats. Toutes les grandes périodes historiques sont représentées, avec des temps forts : l'Antiquité, le Moyen-Âge, le XIXe siècle et l'époque contemporaine. Un grand nombre de ces ponts sont classés monuments historiques. Les ponts romains se rencontrent le long de la Via Domitia et le la Via Aurelia, ainsi qu'à proximité de certaines villes antiques. Ils suscitent toujours beaucoup d'admiration par leur résistance au temps et aux innombrables crues qui depuis 2000 ans ont tenté en vain de les emporter.

 

Vaison

 

Celui de Vaison-la-Romaine construit au 1er siècle de notre ère a non seulement résisté à toutes les catastrophes naturelles, mais il a tenu bon lors du minage effectué par l'armée allemande en 1944. Il est construit à l'endroit le plus resserré de l'Ouvèze. Il ne comporte qu'une seule arche longue d'une vingtaine de mètres dont les culées s'appuient sur le rocher.

 

Pont Julien

 

Le pont Julien au-dessus du Calavon sur la Via Domitia entre Bonnieux et Goult est lui aussi un chef-d'œuvre d'architecture et de technique . Il a fêté ses 2 000 ans d'existence en 1997. Il comporte deux piles avec des éperons protecteurs et des ouvertures pour permettre le passage de l'eau en période de crues.

 

Pont Flavien

 

Le pont Flavien sur le Touloubre à proximité de Saint-Chamas est une petite merveille. Il n'a qu'une arche de 22 mètres de long sur 6 mètres de large. Son dos d'âne a été rongé par le passage des chariots. Deux magnifiques double pilastres sont élevés à chacune de ses extrémités. Elles portent les lions qui ont été restaurés au XVIIIe siècle par le grand sculpteur Jean-Pancrace Chastel.

 

Pont de bateaux d'Arles

 

Malheureusement, il ne reste presque rien du fameux pont de bateau construit à Arles pour franchir le Rhône. On peut en voir une superbe maquette au musée de l'Arles antique. Sur les berges du Rhône, légèrement en amont de Trinquetaille et d'Arles, des amas de pierres signalent simplement les deux points de départ de ce pont. A l'époque médiévale, la Provence, qui est parcourue par les Croisés qui viennent embarquer à Marseille ou à Aigues-Mortes, construit des ponts admirables.

 

Pont-Avignon

 

On connaît bien l'historique et la légende du pont Saint-Bénézet à Avignon, le premier pont de pierres à franchir le Rhône. Le jeune berger, Bénézet, vint à Avignon en 1177, se disant envoyé de Dieu pour construire un pont. Dix ans plus tard, on trouve dans les archives la trace de droits de péage. Il fut donc édifié très rapidement et il devait avoir un tablier de bois. En 1552, le percement de larges dégorgeoirs dans les tympans entraîne l'écroulement d'une partie des arches. On les rebâtit. D'année en année, le pont qui affronte les crues du Rhône subit de gros dégats. En 1668, de nouveau effondrements se produisent et Louis XIV refuse de le reconstruire. Il reste tel qu'on peut le voir aujourd'hui. Comme beaucoup d'ouvrages de cette période, il avait une chapelle à chacune de ses extrémités. On venait y prier avant de franchir le fleuve. Le pont avait une forte valeur symbolique : il représentait le passage d'une rive à l'autre, d'une vie à une autre. Les ponts du Moyen-Âge sont très nombreux.

 

Pont trois sautets

 

On peut citer le pont des Trois-Sautets à Aix-en-Provence, au-dessus de l'Arc, rendu célèbre par Paul Cézanne qui le représenta en 1906, quelques semaines avant sa mort, sur deux aquarelles splendides. Le pont de Saint-Pons, également sur l'Arc, a été construit par les moines de l'abbaye de Saint-Victor. Il fut racheté au XVIIe siècle par le parlementaire Escalis de Saint-Pons, d'où son nom. Plusieurs ponts dits "romains" sont en réalité des ponts romans.

 

Pont_ancien_sur_le_Caramy

 

C'est le cas du pont sur le Caramy ou de celui d'Entrechaux. C'est au XIIe siècle que les hommes équipent de ponts les gorges du Verdon et la vallée de l'Ubaye. On peut admirer les très beaux ponts de Beauvezer, de Moustiers-Sainte-Marie et de Saint-Paul. Curieusement, de la Renaissance au siècle des Lumières, les constructions de ponts sont rares, excepté de petits ouvrages sur les canaux, en particuliers sur ceux d'Adam de Craponne, dans la plaine de le Crau et en Camargue. On restaure tant bien que mal les ponts déjà réalisés. Ceux de Saint-Bénézet et de Bonpas sont abandonnés après les crues de 1668 et 1688, alors que celui de Pont-Saint-Esprit, dans le Gard provençal, est sauvé

 

Pont Pont-Saint-Esprit

 

par la réfection des arches et la construction d'avant et d'arrière-becs très aigus pour lutter contre les crues. C'est le XIXe siècle et la révolution industrielle et technique qui va enfin permettre la réalisation de véritables ouvrages d'art sur le Rhône et la Durance. Le tout premier est celui de Bonpas, à Avignon, dont la construction est décidée par Napoléon Bonaparte qui avait dû franchir la Durance en bac lorsqu'il s'était rendu à Toulon pour embarquer pour l'expédition d'Egypte.

 

Pont de Bonpas

 

La première pierre fut posée le 17 septembre 1804 avec un vibrant discours à la gloire du premier consul. Le pont achevé à la fin de Premier Empire fut un travail gigantesque. Il mesurait 500 mètres de long et nécessitait 47 travées pour enjamber la Durance. Une crue l'emporta en 1886. Les premiers ponts suspendus sont mis en chantier dans le Vaucluse à Mirabeau et à Cavaillon en 1831, à Pertuis en 1833 et à Cadenet en 1857. Ce sont des ponts "fils de fer" comme on les appelle alors.

 

Pont de Mirabeau

Portique de Mirabeau

 

Le plus monumental est celui de Mirabeau pour lequel les architectes ingénieurs ont construit deux portiques monumentaux, un sur chaque rive. Ils sont décorés de niches romanes qui permettent le passage des immenses câbles destinés à soutenir le tablier de bois qui mesure 175 mètres de long. Ces ponts suspendus sur la Durance sont de vrais chefs-d'oeuvre. De nos jours, ils ne servent pas mais ils n'ont pas été entièrement détruits. On peut encore admirer les portiques de Mirabeau, les piliers de Cadenet et même la totalité de Mallemort.

 

Pont-suspendu-de-Mallemort-et-la-Durance

 

Il faut porter ainsi au crédit au XIXe siècle les belles réalisations de ponts tournants et de ponts levants. Ceux du port de Marseille entre les bassins d'Arenc, de la Pinède et de la Digue au large sont maintenant classés monuments historiques. Le XXe siècle confirmera l'audace et l'art du XIXe siècle. Le pont tournant pour le chemin de fer au-dessus du canal de Caronte est une pure beauté. Il est classé monument historique. Il fut détruit lors des bombardements de 1944 et reconstruit à l'identique.

 

Pont canal de Caronte

 

Plusieurs ponts autoroutiers comme ceux de Martigues ou de Tarascon font désormais partie de ce grand patrimoine architectural et technique engendré par cette nécessité du passage d'une rive à l'autre.

 

Source : Les monuments de l'eau en Provence - Jean-Marie Homet - Edisud

 

Pont autoroutier de Martigues

 

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